Le Musée Ferrari de Maranello, situé à quelques mètres de l’usine historique de Ferrari et du circuit de Fiorano, est une destination incontournable pour les amateurs de la marque au Cheval Cabré. Ouvert au public depuis 1990, il attire environ 400 000 visiteurs par an, séduits par la promesse d’une immersion dans l’histoire de Ferrari, de ses supercars emblématiques et de son héritage en Formule 1. Cependant, malgré son prestige, le musée suscite des critiques importantes : un prix d’entrée élevé, une atmosphère perturbée par les selfies, un manque criant d’informations et d’objets historiques sur Enzo Ferrari, et une sélection limitée de modèles exposés. Analyse critique d’une expérience un peu décevante, mettant en lumière ses lacunes tout en reconnaissant ses points forts.

Contexte du Musée Ferrari de Maranello
Le Musée Ferrari de Maranello se distingue par sa proximité avec le cœur industriel de la marque. À la différence du Musée Enzo Ferrari de Modène, qui se concentre sur la vie du fondateur et les modèles de série, Maranello met l’accent sur la Scuderia (compétition) et les supercars d’exception, comme la 288 GTO, la F40 ou la LaFerrari. Le musée propose des expositions permanentes (supercars, Salle des Victoires pour la F1) et temporaires, ainsi que des activités comme des simulateurs de conduite (payants) et des visites en bus du circuit de Fiorano. Ouvert tous les jours sauf le 25 décembre et le 1er janvier, il est accessible de 9h30 à 19h (avril-octobre) ou 18h (novembre-mars), avec un billet standard à environ 24 € (30 € pour un pass combiné avec Modène). Des réductions sont disponibles pour les moins de 19 ans (12 €) et les clubs automobiles.
Malgré cette offre, l’expérience ne répond pas toujours aux attentes des visiteurs, surtout ceux qui recherchent une plongée profonde dans l’histoire de Ferrari. Voici une analyse des principaux points de déception.
1. Un Prix d’Entrée Excessif
Le coût d’entrée, autour de 24 € par adulte pour Maranello seul, ou 30 € pour le pass combiné avec Modène, est jugé élevé par de nombreux visiteurs, surtout compte tenu de la durée moyenne de la visite (1h30 à 2h) et de la santé économique de la maison-mère. À cela s’ajoutent des frais supplémentaires : 20 € pour une session de simulateur, 20 € pour une photo souvenir assis dans un modèle récent mais somme tout assez « commun », avec une housse miteuse pour protéger le siège en cuir (!), ou même 35 € pour une simple tasse à la boutique. Pour une famille de trois personnes, visiter les deux musées peut coûter jusqu’à 88 €, sans compter les extras.

Critique
- Rapport qualité-prix médiocre : Comparé à d’autres musées automobiles, comme le Musée Porsche à Stuttgart (10 €) ou le Musée Lamborghini à Sant’Agata (15 €), Ferrari semble capitaliser sur son prestige sans offrir une expérience proportionnelle. La visite, bien que visuellement impressionnante, manque de profondeur pour justifier ce tarif.
- Commercialisation agressive : La boutique, située à l’entrée et à la sortie, pousse à la consommation avec des produits souvent jugés « de faible design » et hors de prix (ex. vêtements, miniatures). Les activités payantes, comme le simulateur, renforcent l’impression d’un musée conçu comme une machine à profits plutôt qu’un lieu de transmission culturelle.
Contrepoint
Le prix inclut l’accès à une collection unique de supercars et de F1 historiques, ainsi qu’une infrastructure moderne (accessibilité PMR, projections audiovisuelles). Cependant, pour les passionnés attendant une expérience éducative ou immersive, le coût semble disproportionné face au contenu proposé.

2. Une Atmosphère Perturbée par les Selfies
L’ambiance du musée souffre d’une surabondance de visiteurs prenant des selfies, souvent au détriment de l’expérience contemplative. Les réseaux sociaux, où le hashtag #MuseiFerrariExperience est promu, encouragent les visiteurs à partager des photos, transformant le musée en un décor Instagram.
Critique
- Manque de respect pour l’histoire : Les visiteurs, absorbés par leurs selfies devant la F40 ou la Salle des Victoires, bloquent souvent l’accès aux panneaux explicatifs ou aux voitures, rendant la visite chaotique. Cette frénésie photographique nuit à l’appréciation des détails techniques ou historiques.
- Gestion insuffisante : Le personnel, bien que disponible, ne régule pas efficacement ces comportements, même en période d’affluence (ex. été, où les files d’attente atteignent 30 minutes). L’absence de zones dédiées aux photos ou de consignes claires aggrave le problème.
Contrepoint
Le musée ne peut contrôler totalement le comportement des visiteurs, et la popularité de Ferrari attire un public varié, pas toujours passionné par l’automobile. La modernité du lieu, avec ses écrans et son design épuré, invite naturellement à la prise de photos. Toutefois, une meilleure organisation (ex. créneaux horaires pour photographes) pourrait atténuer ce désagrément.
3. Manque d’Informations et d’Objets Historiques sur Enzo Ferrari
Pour un musée situé au cœur du fief Ferrari, l’absence d’une section conséquente dédiée à Enzo Ferrari, le « Commendatore », est une lacune majeure. Si le Musée Enzo Ferrari de Modène se focalise sur sa vie, Maranello se contente d’une reconstitution sommaire de son bureau et de quelques anecdotes éparses.
Critique
- Superficialité historique : Le bureau d’Enzo, avec son « placard à erreurs » (pièces défectueuses), est intéressant mais manque de contexte. Peu de documents personnels, d’archives ou d’objets (ex. correspondances, trophées personnels) sont exposés. Les visiteurs apprennent davantage sur les voitures que sur l’homme qui a bâti la marque.
- Dépendance au musée de Modène : Maranello renvoie systématiquement à Modène pour l’histoire d’Enzo, ce qui frustre ceux qui ne visitent qu’un seul site. Par exemple, la maison natale d’Enzo à Modène offre des reliques plus significatives (photos, outils de son père). Cette division artificielle entre les musées semble stratégique pour vendre le pass combiné.
- Signalétique insuffisante : Les panneaux explicatifs, bien que présents, sont souvent brefs et axés sur les performances des voitures plutôt que sur le contexte historique. Les visiteurs non experts peinent à comprendre l’impact d’Enzo sur l’industrie automobile.
Contrepoint
Le musée de Maranello se concentre sur les voitures et la compétition, un choix cohérent avec son emplacement près de l’usine. La reconstitution du bureau d’Enzo, bien que minimaliste, reflète sa philosophie pragmatique (« on apprend de ses erreurs »). Cependant, pour un public curieux de l’histoire humaine derrière la marque, ces éléments restent trop superficiels.

4. Une Sélection Limitée de Modèles Exposés
Malgré la présence de joyaux comme la 288 GTO, la F40, la F50, la Enzo et la LaFerrari, le nombre de voitures exposées est jugé insuffisant par rapport à l’héritage de Ferrari. Le musée met en avant une sélection restreinte, privilégiant les supercars récentes et les F1 victorieuses, au détriment des modèles historiques ou moins connus.
Critique
- Manque de diversité : Des icônes comme la Testarossa, la 250 GTO ou la 308 GTB sont souvent absentes, au profit de modèles plus récents ou de F1 modernes. Les visiteurs regrettent l’absence de voitures des années 1950-1960, époque où Enzo Ferrari imposait ses principes (ex. vendre les voitures de course après la saison).
- Espace réduit : L’espace d’exposition, bien que moderne, semble sous-dimensionné pour refléter 75 ans d’histoire. Par comparaison, le Musée Porsche expose plus de 80 véhicules contre une trentaine à Maranello. Les expositions temporaires (ex. Hypercars en 2019) ne compensent pas ce déficit.
- Rotation insuffisante : Les modèles changent rarement, sauf pour des événements ponctuels (ex. Le Mans 2023). Les passionnés qui reviennent trouvent peu de nouveauté, ce qui limite l’attrait à long terme.
Contrepoint
Le musée met en avant des modèles phares et des F1 championnes, un choix qui reflète l’excellence de Ferrari. L’espace limité oblige à une sélection rigoureuse, et la proximité de l’usine garantit des pièces authentiques (ex. moteurs exposés, châssis uniques). Cependant, pour un musée de cette envergure, l’absence de modèles emblématiques comme la 250 GTO est difficilement justifiable.
5. Autres Points de Frustration
- Navigation perfectible : La signalétique est parfois confuse, rendant la visite moins fluide. Certains visiteurs notent qu’un plan ou des guides audio (non inclus dans le billet standard) amélioreraient l’expérience.
- Affluence et parking : En haute saison, les files d’attente et le parking saturé (payant, à quelques mètres) compliquent l’accès. Un pass coupe-file est disponible, mais il accentue l’impression de monétisation excessive.
- Manque d’interactivité : Hormis les simulateurs payants, peu d’activités interactives (ex. écrans tactiles, réalité augmentée) sont proposées pour enrichir l’expérience, contrairement à des musées modernes comme le Mercedes-Benz Museum.
Points Positifs à Souligner
Malgré ces critiques, le Musée Ferrari de Maranello offre des atouts indéniables :
- Collection prestigieuse : Les supercars exposées (F40, LaFerrari) et la Salle des Victoires, avec ses F1 championnes (ex. Schumacher), sont spectaculaires et bien mises en scène.
- Immersion visuelle : Les projections audiovisuelles et le design moderne (conçu par des architectes renommés) créent une ambiance captivante, même pour les non-initiés.
- Accessibilité : Le musée est adapté aux PMR, avec des fauteuils roulants gratuits et des commodités pour familles (tables à langer, dépôt poussettes).
- Proximité historique : La localisation près de l’usine et de Fiorano ajoute une dimension authentique, renforcée par la visite en bus (optionnelle, 45 min).
Comparaison avec le Musée Enzo Ferrari de Modène
Le Musée Enzo Ferrari de Modène, à 20 km, offre une expérience complémentaire mais différente. Pour 27-32 € (ou 38-42 € avec le pass combiné), il propose une exposition plus riche sur la vie d’Enzo (maison natale, archives) et des modèles uniques (ex. 166 Inter, 250 GT). Son architecture futuriste, signée Jan Kaplicky, et ses projections cinématographiques immersives séduisent davantage les visiteurs en quête d’histoire. Cependant, il souffre aussi d’un nombre limité de voitures (environ 20) et d’un tarif élevé. Les deux musées semblent conçus pour se compléter, mais cette fragmentation frustre ceux qui ne visitent que Maranello.
Conclusion
Le Musée Ferrari de Maranello est une vitrine prestigieuse pour la marque, offrant un aperçu fascinant des supercars et de la Formule 1. Cependant, son prix élevé, l’omniprésence des selfies, le manque d’informations sur Enzo Ferrari, et la sélection limitée de modèles exposés déçoivent les passionnés en quête d’une expérience historique et immersive. Si l’emplacement mythique et la qualité des expositions séduisent, le musée donne trop souvent l’impression de privilégier le commerce au détriment de la transmission du patrimoine Ferrari. Pour les visiteurs intéressés par l’histoire de la marque, le Musée Enzo Ferrari de Modène, bien que perfectible, offre une perspective plus humaine et complémentaire. En attendant des améliorations, le musée de Maranello reste une expérience à réserver aux fans inconditionnels prêts à payer le prix de l’exclusivité.